Publié le Mardi 28 février 2017 à 12:00:00 par Cedric Gasperini
Torment : Tides of Numenéra (PC, PS4, Xbox One)
Une histoire à mourir debout
La Terre, quelques centaines de millions d’années après notre ère. L’humanité a atteint huit fois le nirvana technologique, le Saint Graal de l’évolution, avant de péricliter à chaque fois, laissant aux générations futures quelques artefacts aujourd’hui appelés Numenéras. Trop évolués technologiquement pour l’époque actuelle, ces numenéras sont aujourd’hui considérés comme des objets magiques.Nous en sommes au Neuvième Monde. En espérant que ce ne soit pas le dernier.
Planescape Torment, sorti fin 1999 et signé Black Isle Studios, s’est inscrit au fil des années comme l’un des jeux de rôle phare sur PC. Bavard mais passionnant, il tutoie aujourd’hui les Fallout et autres Baldur’s Gate au Panthéon du genre.
Torment : Tides of Numenéra est donc sa suite. Elle est développée par inXile Entertainment, qui ne sont pas des novices en la matière puisque sous l’égide de son patron et développeur Brian Fargo (Fallout), ils nous ont livré The Bard’s Tale ou l’excellent Wasteland 2 il y a 3 ans déjà.
Vous voilà donc plongé dans ce monde où technologie et fantasy se côtoient, où les armes énergétiques répondent aux armes blanches, où les fantômes succèdent aux robots, et où explosions ponctuent les combats à l’épée ou à la hache. L’univers de Torment : Tides of Numenéra est assez particulier et mélange les genres. La première difficulté pour le joueur sera peut-être d’y trouver ses repères et arriver à s’y intégrer. On oscille constamment entre fantasy et SF, les décors abritant tout aussi bien des créatures fantastiques que des ordinateurs.
Cela dit, grâce à une narration complète, même si complexe, très détaillée et savamment maîtrisée, le Neuvième Monde prend vie de manière spectaculaire et pour peu que vous preniez le temps de plonger dans le jeu, vous serez rapidement happé par son ambiance.
Vous incarnez le Dernier Reliquat, enveloppe corporelle qui a servi au « Dieu Changeant », divinité éternelle qui renaît dans des corps au gré de ses envies et de ses besoins. Votre esprit s’est éveillé lorsqu’il a abandonné votre enveloppe et vous naissez donc, adulte, dans un monde qui vous est étranger. A quelques petits détails près : certains souvenirs du Dieu Changeant vous sont restés. Certaines populations vous adulent, d’autres vous craignent. Vous n’êtes pas le seul reliquat vivant. Et tous les reliquats sont poursuivis par l’Affliction, une force surnaturelle qui cherche simplement à rétablir l’équilibre sur le monde en détruisant le Dieu Changeant et ses anciennes enveloppes.
Dans la bonne veine des jeux de rôle, Torment : Tides of Numenéra vous plonge donc dans une succession de rencontres et de quêtes à remplir. Et il y en a un paquet. De villes en villes (le jeu est quasiment exclusivement citadin), vous allez découvrir des rues et places fourmillant de personnes, chacune y allant de sa petite histoire et certains vous proposant différentes quêtes.
Le jeu est extrêmement verbeux. Vous allez devoir vous taper des milliers de lignes de dialogues pour bien en comprendre l’évolution, le déroulement, l’histoire. La bonne nouvelle, c’est que la traduction française est très soignée. Un excellent point à ce niveau-là.
L’autre bonne nouvelle, c’est la cohérence du monde et l’impact de vos décisions sur le déroulement de l’histoire. Autrement dit, on est vraiment loin des RPG classiques à base de rencontres aléatoires pour les combats, zones à nettoyer par la force, et autres rencontres face à des ennemis. Dans cette fantasy SF réaliste, les gens vivent leur vie et vous déambulez au milieu d’eux. Si vous voulez vous la jouer intelligent, vous pouvez. Et ainsi éviter la quasi-totalité des combats. Le jeu devenant une grande histoire qui se déroule sous vos yeux et que vous tentez d’influencer par vos décisions et votre capacité de réflexion et de déduction. Réfléchir. Voilà le nerf de la guerre. Et il y a fort à parier que le jeu soit terminable sans la moindre violence.
Si toutefois vous vous voyez projeté en plein combat, ils seront généralement vite expédiés. Vous trouverez en effet durant votre périple suffisamment d’équipement et d’armes, ainsi que des compagnons suffisamment puissants pour affronter tout et n’importe qui (ou n’importe quoi). Toujours en tour par tour, les combats restent très classiques et succombent à la facilité du placement des personnages : bourrins devant, mages ou tirs à distance derrière. Efficace, simple, imparable. L’IA ennemie n’est pas forcément au niveau et le challenge, à ce niveau-là, reste assez faible, malgré quelques sursauts d’orgueils de vos ennemis.
Mais on le répète : le jeu base toute son expérience sur la narration et ce que vous allez bien pouvoir faire ou décider. On passera donc outre une interface brouillonne (vous vous y ferez quand même) pour garder l’unique plaisir de déambuler dans un univers extrêmement riche et bien décrit, très bien présenté, et avec ce qu’il faut de surprises, d’humour, de quêtes variées et intéressantes.
Durant une trentaine d’heures environ, vous allez donc aller de bout en bout du jeu, via différentes zones et décors sublimes et somptueux. Dépaysant, passionnant, certes, mais inégal. En effet, les développeurs ont particulièrement soigné les deux premiers tiers du jeu. La suite est plus brouillonne, moins complète, avec des choix qui impactent moins le déroulement de l’histoire. Un peu comme si le succès du financement via Kickstarter avait donné l’idée aux développeurs de gonfler l’histoire via un nouveau chapitre, mais qu’ils n’avaient pas eu le temps de le bosser et de le complexifier autant que la première partie. On déboule donc, dotés de compagnons suffisamment forts pour ne plus rater ses actions ou ses combats, et si l’écriture reste de qualité, la magie a tendance malheureusement à s’étioler au fil des heures de jeu.
Au final, donc, Torment : Tides of Numenéra ne tient pas forcément toutes ses promesses, ou du moins ne réussit pas à combler tous les espoirs qu’on mettait en lui. Quelques choix dommageables (fin de jeu moins intense et complète, facile, certaines mécaniques de jeu anecdotiques) plombent un peu l’expérience. Certes. Mais cela n’enlève rien à la qualité du jeu. Une narration excellente, une ambiance fantastique, sublimée par des graphismes réussis et une musique sublime, une histoire passionnante et si bien racontée, des quêtes variées et intéressantes, le tout mis en valeur par une version française de qualité font de Torment : Tides of Numenéra un jeu de rôle forcément indispensable pour les fans du genre.
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Torment : Tides of Numenéra (PC, PS4, Xbox One)
Plateformes : PC - Xbox One - PS4
Editeur : Techland
Développeur : inXile Entertainment
PEGI : 16+
Prix : 50 €
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